Mathieu BelayMathieu Belay, Le samedi 30 janvier 2016
Restaurants

Les 50 meilleurs restaurants de Paris #1 : le Grand Véfour

Attention, événement. Avec ce premier article consacrée au Grand Véfour, mythique restaurant du Palais Royal, on donne le coup d’envoi d’un grand cycle éditorial consacré à 50 tables parisiennes emblématiques. Découvrir le meilleur de la gastronomie à Paris, ça se passe ici !
  • À l'intérieur du Grand Véfour, un spectaculaire décor néo-classique en provenance du Directoire © DR
    À l'intérieur du Grand Véfour, un spectaculaire décor néo-classique en provenance du Directoire © DR
Le Tout-Paris artistique, politique et littéraire se presse alors au Véfour. Napoléon Bonaparte, Joséphine, Mac Mahon, George Sand, Lamartine, Victor Hugo, et bien d'autres encore font alors partie des habitués.

Édito

Attention, l’article que vous allez lire n’est pas n’importe un sujet lambda mais le premier d’une longue série, véritable fil rouge des prochains mois et preuve que Yonder va, plus que jamais, mettre la gastronomie au cœur de ses contenus.

Avec le Grand Véfour, nous démarrons donc de la meilleure manière qui soit un grand cycle éditorial autour de la gastronomie parisienne que l’on va s’appliquer à conjuguer à travers deux axes.

D’un côté, raconter l’histoire de 50  restaurants emblématiques - nos « 50 meilleurs restaurants » - de la scène gastronomique et culinaire parisienne. De l’autre, échanger avec les 50 chefs se cachant derrière ces adresses, les véritables talents qui l’on doit ces restaurants en évoquant, notamment leurs inspirations et influences.

Plus qu’un énième classement ou un nouveau système de notations, notre ambition est de vous raconter la fascinante scène gastronomique parisienne à travers ses plus belles tables et en allant à la rencontrer des chefs qui font Paris en 2016.

On vous laisse découvrir le premier épisode de cette toute nouvelle série consacrée à une immense maison, un véritable temple de la gastronomie, le Grand Véfour.

Et on vous invite bien sûr à lire avec attention le récit de notre rencontre avec le talentueux Guy Martin, qui officie depuis exactement 25 ans dans ce restaurant de légende.
 

Le pitch : une maison mythique qui a rayonné à travers les siècles

Si vous aimez un tant soi peu la gastronomie, que vous vivez à Paris et que vous n’avez jamais entendu parler du Grand Véfour, c’est que vous êtes probablement parti faire un tour sur Mars pendant quelque temps…

Le Grand Véfour, bien plus qu’un simple restaurant, est un mythe, une institution, une maison qui à elle seule symbolise l’Histoire de Paris. De l’ancien « Café de Chartres », qui a ouvert ses portes juste avant la Révolution, l’adresse située au bout des jardins du Palais-Royal, en plein cœur historique de la capitale, s’est muée en Grand Véfour dans la première moitié du XIXème siècle suite au rachat du café par Monsieur Jean Véfour.

Le Tout-Paris artistique, politique et littéraire se presse alors au Véfour. Napoléon Bonaparte, Joséphine, Mac Mahon, George Sand, Lamartine, Victor Hugo, et bien d'autres encore font alors partie des habitués.

Paul Bocuse, qui après avoir déjeuné plusieurs fois au Grand Véfour dira à Guy Martin : « Tu es le digne successeur de Raymond Oliver ».


Il faudra ensuite attendre les lendemains de la Seconde Guerre mondiale pour voir le Grand Véfour renaître de ses cendres, après une longue période de déclin. Jean Cocteau, grand habitué des lieux, décrivait alors le Véfour comme « une épave exquise des grandes tempêtes » signe que le restaurant ne se portait pas franchement bien pendant l'entre-deux-guerres !

L’arrivée en 1948 du célébrissime chef Raymond Oliver, « l’Escoffier moderne » selon le chroniqueur gastronomique Nicolas de Rabaudy, va tout changer. Le chef, le premier à faire venir la gastronomie à la télévision, restera la figure mythique du restaurant pendant plus de trois décennies. Il est aussi celui qui fait revenir les artistes et intellectuels de l’époque. Jean Marais, Sacha Guitry, André Malraux, Emmanuel Berl, Louis Aragon, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir font partie des fidèles absolus. Sans oublier Colette, qui, en voisine, avait fait du restaurant sa cantine. Et évidemment Cocteau, autre voisin assidu, fidèle parmi les fidèles, qui a toujours été là, même dans les moments de creux.

Moment sombre de l’histoire du restaurant, le Grand Véfour est touché en décembre 1983 par un attentat qui restera non revendiqué. Une dizaine de convives sont blessés, parmi lesquels Maurice et Françoise Rudetzki qui, choqués par cet événement, créeront ensuite l'association SOS Attentats.

1991 marque un autre tournant dans l’histoire du restaurant. Jean Taittinger, alors propriétaire des lieux, décide de confier les rênes du restaurant à un chef venu de Savoie : Guy Martin. Le jeune chef a déjà beau avoir fait ses preuves au Château de Divonne où il a glané deux étoiles, le pari n'en reste pas moins risqué. Âgé de 34 ans seulement, n’ayant pas fait ses classes auprès des plus grands, Guy Martin, cuisiner autodidacte, n’est pas un chef comme les autres. Arrivera-t-il à succéder aux légendes qu’étaient Jean Véfour puis Raymond Oliver ?

La consécration arrivera rapidement. Paul Bocuse, « le cuisinier du siècle », qui après avoir déjeuné plusieurs fois sur place dira à Guy Martin « tu es le digne successeur de Raymond Oliver ». Difficile de faire un plus beau compliment au chef savoyard, définitivement adoubé par l’un de ses héros.

Quelques années plus tard, en 2000, c’est au tour du Guide Rouge de sacrer Guy Martin en lui apportant la troisième étoile que Raymond Oliver avait déjà obtenu pendant trente ans. Et peu importe si le restaurant perd sa troisième étoile en 2008, le Grand Véfour n’a pas besoin d’elle pour faire perdurer la légende. 

Le Savoyard décrit sa cuisine comme contemporaine, centrée autour de produits nobles et volontiers inspirée par la peinture, l’une de ses passions, comme par les voyages.


Dans l’assiette

On est fin prêt à découvrir les créations de Guy Martin. Le Savoyard décrit sa cuisine comme contemporaine, centrée autour de produits nobles – et français – et volontiers inspirée par la peinture, l’une de ses passions, comme par les voyages. Qu’en est-il concrètement ?

Premiers éléments de réponse avec cette superbe entrée, dans la lignée des plus grandes entrées gastronomiques : oursin de Méditerranée dans une fine gelée de champagne Ruinart rosé, caviar osciètre prestige Kaviari. Le visuel est soigné, les goûts précis, la sophistication extrême.
 

Oursin, gelée de champagne rosé, caviar : la première entrée du déjeuner. © Yonder.fr

 

On continue avec une seconde entrée, chaude cette fois, et pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit de l’un des plats signatures de Guy Martin, les ravioles de foie gras, crème foisonnée truffée.
 

L’un des plats signatures de Guy Martin, les ravioles au foie gras, crème truffée © Yonder.fr

 

Séduisant mélange que cette assiette mythique du chef savoyard, réunissant des produits considérés comme parmi les plus nobles de la gastronomie française (le foie gras, la truffe) mais travaillée avec richesse et gourmandise là où beaucoup de grands chefs contemporains miseraient sur plus de minimalisme.
 

Moment fromager d’exception avec ce Brillat Savarin truffé, simplement accompagné de quelques coings infusés aux épices douces.

On a ensuite ce homard bleu rôti dans sa carapace, duchesse de céleri rave en tempura d’encre de seiche, jus parfumé aux zestes de citron lié au corail. Si l’intitulé peut sembler alambiqué, la composition est simple, claire, équilibrée. Un excellent homard, cuit à la perfection, juste sublimé par un jus subtil et un formidable céleri façon tempura. Un plat qui incarne à la perfection la philosophie de cuisine de Guy Martin.
 

Homard bleu rôti dans sa carapace : le point d’orgue de ce déjeuner © Yonder.fr

 

Moment fromager d’exception avant d’attaquer le sucré avec ce Brillat Savarin truffé, simplement accompagné de quelques coings infusés aux épices douces, l'un des fruits préférés de Guy Martin. Si l’on trouve parfois difficile d’enchaîner entrées, plats, fromage ET desserts, difficile de résister devant une telle merveille.
 

Le Brillat Savarin truffé : ça se passe de commentaires. © Yonder.fr

 

 

 

On a enfin ces deux desserts. Une jolie mise en bouche pour rafraîchir le palais prenant la forme d’une pomme cuite façon tatin, accompagnée tout en légèreté d’une pana cotta pomme verte d’un très frais sorbet poire romarin. Un pré-dessert qui, s’il n’a rien de très original, a le mérité d’être aérien et parfaitement maîtrisé.
 

Pommes cuites comme une Tatin : un pré-dessert tout en subtilité et légèreté © Yonder.fr

 

Pour conclure ce déjeuner d’exception, un cube de chocolat noir Manjari (64%) garni de fruits (orange et grenade) dont l’acidité est adoucie par un sorbet et un biscuit coco. Le dessert, s’il n’est pas non plus follement original sur le fond est ludique (le convive est invité à casser d’un coup sec son cube de chocolat), gourmand et surtout incroyablement exécuté. Une grande maîtrise technique que l’on doit, entre autres, à Mourad Rachdi, le très talentueux chef pâtissier du Grand Véfour.
 

Le cube chocolat Manjari avant d’être ouvert © Yonder.fr

 

Ce même cube, brisé, permet de découvrir une garniture de fruits (orange et grenade) © Yonder.fr

 

Nombreux sont les touristes étrangers à venir s’installer sur les confortables banquettes, en quête d’une expérience à la fois quintessentiellement parisienne mais aussi d’un voyage dans le temps.


Dans la salle

Entrer au Grand Véfour, c’est s’offrir une plongée dans l’Histoire de Paris. Le décor néo-classique, d’inspiration pompéienne, date du Directoire et de la Restauration. Peintures fixées sous verre inspirées de l’Antiquité, miroirs omniprésents, lustres en cristal, dorures, grandes banquettes de velours rouge, on vient célébrer dans ce cadre somptueux la grande restauration française, celle qui définira la gastronomie hexagonale comme l’un des fers de lance de l’art de vivre à la française.

Au-delà d’une clientèle d’habitués, nombreux sont les touristes étrangers à venir s’installer sur les confortables banquettes, en quête d’une expérience à la fois quintessentiellement parisienne mais aussi d’un voyage dans le temps.
 

Aucun repas au Grand Véfour ne saurait être complet sans le fameux Gâteau de Savoie, recette de la grand-mère de Guy Martin © Yonder.fr

 

Le service

Le service, lui aussi, incarne la tradition de recevoir à la française. Évidemment très professionnelle et aguerrie aux contraintes du grand restaurant, l’équipe en salle fait bien plus qu’apporter les plats. Elle est en charge d’animer le repas, d’incarner la cuisine et les assiettes, de faire vivre le lieu et son histoire. Bref, de faire passer aux convives un moment d'exception.

Si l’on n'adhère pas au service, c’est que l’on est probablement pas fait pour vivre l’expérience du « grand restaurant » telle que la propose avec maestria le Grand Véfour.

Le Grand Véfour n’est pas un restaurant comme les autres, c’est l’incarnation vivante du « Grand Restaurant » à la française.


L’addition

Comptez de 200 à 250€ à la carte sans les vins, 315€ pour le menu dégustation simplement intitulé « Plaisir ». Au déjeuner une carte-menu comprend une entrée, un plat, un fromage et un dessert, est proposée au tarif nettement plus accessible de 115 €.

Si ces prix peuvent paraître élevés, n’oublions pas que nous sommes au Véfour dans un temple de la gastronomie. L’une des adresses les plus prestigieuses de la capitale dans laquelle vous seront servis de très grands plats, héritage contemporain de la tradition gastronomique française dans ce qu’elle a de plus noble.
 

Le mot de la fin

Comme vous l’aurez compris à la lecture de ces lignes, le Grand Véfour n’est pas un restaurant comme les autres, c’est l’incarnation vivante du « Grand Restaurant » à la française, celui qui fait rêver le monde entier depuis des décennies et qui continue d’ailleurs à fasciner la nouvelle génération de chefs, à commencer par Jean-François Piège.

Aller déjeuner – ou dîner – au Grand Véfour, c’est s’offrir une plongée dans l’histoire de la haute cuisine française, se remémorer l’Histoire de Paris, se régaler d’assiettes à l’élégance intemporelle ou se faire plaisir avec de très grands vins. Le Grand Véfour, c’est un condensé de France, de son art de vivre, de sa gastronomie de son héritage et de sa créativité.
 

Bonus : découvrez l’interview exclusive de Guy Martin réalisée par nos soins


Pratique

Le Grand Véfour

17 rue de Beaujolais, Paris 1er
Métro : Palais-Royal – Musée du Louvre ; Pyramides ; Bourse

Du lundi au vendredi, ouvert pour le déjeuner et le dîner. Fermé le week-end.

Pour le déjeuner, une carte-menu et à prix fixe est proposée à côté de la grande carte. Menus à 115 € (déjeuner uniquement) et Menu Plaisir à 315 €,
Carte 200-220 €.

Réservations sur le site Web du Grand Véfour.

Tél : +33 (0)1 42 96 56 27