Vous êtes ici

David UkaleqDavid Ukaleq, Le mercredi 25 mars 2015
Grand angle

Découverte des îles Féroé : suite de l'aventure

Deuxième volet de notre journal de voyage aux îles Féroé.
  • Le village de Saksun, à la beauté à la fois austère et magique.
    Le village de Saksun, à la beauté à la fois austère et magique.
  • Collage panoramique.
    Collage panoramique.
  • Vue de la gorge qui prolonge le port de Mykines.
    Vue de la gorge qui prolonge le port de Mykines.
  • Vue aérienne de l’hôtel Føroyar. Un example d’intégration dans le payage. © Hotel Føroyar
    Vue aérienne de l’hôtel Føroyar. Un example d’intégration dans le payage. © Hotel Føroyar
  • Oeuvre d’art dans le lobby de l’hôtel Føroyar.
    Oeuvre d’art dans le lobby de l’hôtel Føroyar.


A Elduvík, le "home café" occupe une pièce d'une maison privée.

                                                                                        Retour vers la partie 1

Pause café à Elduvík

Le lendemain le temps est moins beau et nous ralentissons un peu le rythme, fatigués par la journée bien remplie de la veille. Et incidemment par un rhume qu’on a apporté d’Europe continentale. Après une promenade dans Gjógv, nous prenons la route en direction de Elduvík, village situé de l'autre côté du Funningsfjørður que contourne la route. Je me suis renseigné et il y a là un café dans lequel j'ai bien l'intention de faire une pause. Le Eldvík Home Café porte bien son nom : il est situé dans la maison d’une famille féroïenne dont il occupe une partie du premier étage avec une cuisine ouverte et plusieurs tables pour accueillir les visiteurs. Nos hôtes féroïens, Frida et Poul, nous servent du café et passent un long moment à discuter avec nous. Frida nous fait goûter le Sandkaka, un gâteau avec des raisins que les féroïens garnissent traditionnellement de viande de macareux… quand ils en ont. Elduvík n’a été relié par une route qu’en 1978, et avant cette date, le seul accès était maritime. Promenez-vous entre les maisons colorés et prenez les marches en direction du vieux port d'où vous apprécierez la vue sur le Funningsfjørður.

  • Sur la route de Saksun.

Saksun

Mon ami chinois devant rentrer à Tórshavn pour reprendre l’avion le lendemain, je vais le déposer à la station de bus d'Oyrarbakki. Puis je retraverse le pont en direction de Streymoy pour aller visiter Saksun. C’est après avoir parcouru une curieuse route sinueuse, qui a son intérêt propre, qu’on parvient dans ce village d'une trentaine d'habitants. Ses maisons au toit de tourbe sont situées dans un environnement à la beauté austère qui lui donne un caractère tout à fait unique. Une vision de carte postale, que vous en achetiez la version papier traditionnelle pour y coller un des beaux timbres féroïens, ou que vous la postiez en temps réel sur facebook avec votre smartphone. Bordé de part et d'autre par des parois rocheuses dont la courbure forme une sorte d'amphithéâtre naturel, Saksún domine à l'ouest le lac Pollurin, en réalité un lagon, accessible depuis la mer seulement à marée haute. 

Différentes randonnées sont possibles depuis Saksun, en particulier pour Tjørnuvík, village dont le site est magnifique et qui offre une des plus belles vues sur les deux stacks (piliers ou rochers marins) Risin et Kellingin, le géant et la sorcière. On dit qu’une nuit ils vinrent d’Islande dans le but d’y ramener les Féroé en les tirant avec une corde. Mais leur tentative échoua et les premiers rayons du soleil les changèrent en pierre. Comptez 4 heures pour rejoindre Tjørnuvík et préparez un moyen de retour vers Saksun.  Si vous préférez vous contenter de marcher aux environs du lac, attention le terrain est très boueux et des bottes en caoutchouc sont plus appropriées que des chaussures de randonnée ! 

Bien qu'il ne soit pas très tard, je rentre à la Gjaargarður Guesthouse. Je m'arrête quelques fois le long de la route pour faire des photos mais le temps - vent et brouillard sur le Slættaratindur - ne se prête pas à de plus longues balades.

  • Vue panoramique du Funningsfjørður à Eysturoy.
  • Le site du village de Saksun, magnifique et inquiétant à la fois.
  • Chevaux à Saksun.
  • Tjørnuvík vu depuis la mer. © Visit Faroe Islands / Erik Olsson
  • Les moutons sont omniprésents aux Féroé.

 

Pour arriver au "cap des Trolls" pas moins de 5 tunnels.

Kalsoy et Kunoy via Klaksvík

Aujourd’hui j’ai prévu d’aller à Trøllanes sur l’île de Kalsoy. Le point de vue y est un des plus impressionnants des îles Féroé. En fait, Kalsoy est située juste en face de Gjógv mais on y accède en ferry depuis Klaksvík (5000 habitants), deuxième ville des Féroé, sur l’île de Borðoy. Depuis 2006 cette dernière est reliée à Eysturoy par un tunnel sous-marin de 6.5 km dont l’entrée se trouve à l’est de la petite ville de Leirvík. Le tunnel descend jusqu’à 150 mètres en-dessous du niveau de la mer et, vers le milieu, intègre des éclairages conçus par l’artiste féroïen Trondur Paturrson. Soyons franc, après avoir lu une description de ces derniers je m’attendais à quelque chose de plus impressionnant ; mais quoi qu’il en soit j’arrive très rapidement à Klaksvík. Avec beaucoup d’avance sur le ferry, et du coup je décide d’aller jeter un oeil sur Kunoy, île voisine de Kalsoy qui en a la même forme allongée et qui, comme elle, est essentiellement une longue chaîne de montagnes. Mais contrairement à Kalsoy, elle est reliée à Borðoy par une digue qui en rend la visite particulièrement aisée.

Pas besoin de se demander où aller sur Kunoy, car hormis Haraldssund, juste de l’autre côté de la digue, il n’y a qu’un village sur l’île, nommé Kunoy comme cette dernière, et une seule route qui y mène via un tunnel percé à travers la montagne pour gagner la côte ouest. Il y avait autrefois un troisième village, Skarð, mais il fut abandonné après qu’un accident de pêche dramatique en eut décimé la population masculine en 1913. Les habitants de Skarð, située au nord-est de l’île, avaient l’habitude de franchir la montagne tous les dimanches pour assister à l’office religieux à Kunoy. Un chemin particulièrement difficile, qui aujourd’hui est réservé aux randonneurs et grimpeurs les plus expérimentés.

Kunoy est adossée à d’austères parois rocheuses qui donnent au site un côté légèrement inquiétant, surtout lorsque le sommet de la montagne disparait dans le brouillard. Mais si l’on tourne la tête de l’autre côté, vers l’ouest, on aperçoit la route sur l’île de Kalsoy, sur laquelle je roulerai tout à l’heure.

Après une brève pause dans le village de Kunoy, je refais le chemin en sens inverse vers le port de Klaksvík où quelques voitures attendent déjà le ferry pour Kalsoy. Bientôt nous embarquons. La plupart des passagers descendent dans la cale du navire, où sont installées tables, banquettes et une machine à café. Pour beaucoup ce sont des Féroïens qui viennent visiter de la famille. J’entame la conversation avec deux suédois qui comme moi se rendent à Trøllanes et veulent faire la randonnée pour le phare de Kallur, 1,6 km à l’ouest de Trøllanes. Nous décidons de faire le chemin ensemble. Absorbé par la conversation je ne remarque pas le remous qui commence à rendre mes interlocuteurs nauséeux. Mais la traversée n’est pas longue. 

En arrivant à Kalsoy, on se demande qui a bien pu avoir l’idée de s’installer ici. L’île n’est guère qu’une succession de montagnes et pour atteindre Trøllanes, il faut traverser pas moins de cinq tunnels ! A peine sorti de l’un, on entre dans un nouveau. Comme beaucoup de tunnels aux Féroé, ils ne comportent qu’une seule voie, avec des espaces d’évitement aménagés toutes les quelques dizaines de mètres pour permettre à deux voitures de se croiser. Rassurez-vous, en pratique, ça ne se produit pas si souvent.

  • Le village de Kunoy situé sur l’île du même nom.
  • Vue de la côte nord-ouest de Kunoy depuis un bateau. En contrebas des monts Kunoyarnakkur et Klubbin. | © Arne List - Flickr CC - http://flic.kr/p/4WSmYj
  • Embarcadère à Kalsoy.
  • Un des tunnels de Kalsoy.
Le mythe de la femme-phoque ou selkie est également répandu en Ecosse et aux Shetland.
  • Carte topographique des îles Féroé ( ouvrir l’original en grand ) | CC-by-SA / Mysid
Carte des Féroé.

Trøllanes et le phare de Kallur

Le dernier tunnel avant Trøllanes (“cap des trolls”) ne date que de 1986. Avant cette date les habitants vivaient dans un isolement extrême, devant gravir la montagne à pied et la redescendre pour se rendre dans le village de Mikladalur, situé avant le tunnel actuel. Un trajet souvent impossible à faire en hiver en raison de l’épaisseur de neige. Pourtant les habitants n’avaient pas d’autre choix quand les trolls venaient faire leur visite annuelle à l’occasion de la Nuit des Rois (le 6 janvier). Mais une année, une vieille femme trop faible pour ce voyage éreintant dut rester à Trøllanes. Terrorisée à la vue des trolls, elle implora l’aide de Jésus. Par chance, le seul mot “Jésus” suffit à mettre en fuite les horribles créatures qui jusqu’à présent ne sont jamais revenues.

Vous l’avez compris, ces faits sont plus légendaires qu’historiques. Mais en parlant de légendes, Mikladalur est aussi le lieu d’une d’elles. Un marin s’était épris d’une femme-phoque et lui confisqua sa peau, sans laquelle elle était forcée de rester à terre. Ils vécurent comme mari et femme et eurent plusieurs enfants. Mais un beau jour, le marin oublia la clé de la commode dans laquelle il avait caché la peau. Sans surprise, il trouva la maison vide à son retour, sa femme ayant regagné la mer. L’histoire prend un tour encore plus sombre quand, contre les mises en garde, les marins du village tuent le nouveau mari phoque de la jeune femme et deux de ses fils phoques. Ceux-ci ne seront vengés que par la mort des hommes de Kalsoy, par noyade ou en chutant des falaises, et dans un nombre assez grand pour former une chaîne humaine tout autour de l’île !  En fait le mythe de la femme-phoque ou selkie est également répandu en Irlande et en Ecosse, particulièrement aux Shetland, soulignant une fois de plus la proximité culturelle des Féroé avec ces dernières.

 

  • Randonnée vers le phare de Kallur.

 

J’avais entré quelques waypoints dans mon gps mais ceux-ci ne s’avèrent pas nécessaires. Il n’y a guère de possibilité de se tromper pour aller au phare de Kallur. Après environ 45 minutes nous atteignons notre but et ne sommes pas déçus ! Nous sommes ici dans l’un des endroits les plus photographiés des Féroé avec ses falaises à pic de de 230 mètres, la montagne qui s'élance vers le ciel juste derrière le phare et la vue sur les îles voisines. Notre compagnon suédois décide de gagner le promontoire qui forme l'extrémité du cap en passant sur l’espèce de crête qui le relie au site du phare. Cela est en fait moins difficile qu’il n’y parait (soyez prudent quand même ! ) et je décide de faire de même. Seule la pointe nord de l’île de Vidoy, visible au loin, est plus septentrionale que Kallur. Plus près nous voyons Kunoy et s’il n'est pas dans les nuages comme aujourd’hui le sommet du Kunoyarnakkur (819m). De l’autre côté, vers l’ouest, des endroits désormais familiers, Gjógv et, au bord du Funningsfjørður, Elduvík.

Un coup d’oeil à la montre et nous réalisons qu’il est temps de rentrer. Une partie du chemin est en descente et le retour vers Trøllanes est plus rapide. Le terrain est si humide que nous avons les pieds trempés malgré la membrane imperméable des chaussures. Nouvelle traversée des tunnels et de la mer en ferry. Direction Tórshavn où cette fois j’ai réservé à l’hôtel Føroyar, le meilleur des Féroé. Mais je veux d’abord faire une pause café/gâteau à Klaksvík.

Retour à Tórshavn et arrivée à l’hôtel Føroyar

Je fais donc halte au café Klingran (plus précisément le Bakaríið hjá Jórun la graphie est intimidante mais pensez à l’anglais bakery), un endroit qui semble très apprécié des locaux en ce dimanche après-midi. Pas de liste compliquée de cappuccinos et autres latte, je prendrai un café classique mais en revanche un grand choix de gâteaux, viennoiseries, du bon pain et des pizzas. Ambiance sympathique. Une alternative plus cosy est le Frída Klaksvik Café situé près du port.

 

  • L’hôtel Føroyar, dont l’architecture se fond dans le paysage.

 

Le soleil qui s’était fait discret jusqu’à présent perce en soirée et après avoir passé Kollafjørður, je décide de ne pas tourner à gauche sur la 50 (Kaldbaksvegur), la route la plus rapide pour Tórshavn, mais de continuer sur la 10, qui curieusement bifurque à gauche quelques kilomètres plus loin pour repartir vers le sud en une route de montagne, Oyggjarvegur (en continuant tout droit on passerait en réalité sur la 40 en direction du tunnel pour Vágar ou de Vestmanna).  Je ne le regrette pas car elle offre des vues bien plus intéressantes. Et même si on roule un peu plus lentement elle est malgré tout assez large et bien entretenue. Autre avantage : l’entrée de l’hôtel  - et du Kerjalon Hostel situé juste à côté - se trouve sur Oyggjarvegur juste avant la descente finale vers Tórshavn.

Ce 4-étoiles offre une vue sans égale sur la ville et l’île de Nólsoy située juste en face. Les jours où accoste le M/S Norröna, le ferry qui fait la liaison avec le Danemark et l’Islande, on ne se lasse pas d’observer l’approche du navire puis l’activité autour du port. Mais qu’on change de perspective et qu’on regarde l’hôtel depuis Tórshavn - ou du moins en prenant un peu de recul en contrebas - et on se rend compte que sa structure allongée et plate, au toit recouvert de tourbe à l’instar des maisons traditionnelles, a été concue pour qu’il se fonde dans le paysage. Un pari architectural réussi.

 

  • A côté du phare de Kallur.
  • Phare de Kallur, Kalsoy.
  • En revenant vers Trøllanes, visible à l'arrière-plan.
  • Le port de Tórshavn visible depuis une fenêtre dans un couloir de l'hôtel Føroyar.
Macareux, pétrels, fulmars, guillemots… Ce sont des dizaines d’espèces qu’on trouve à Mykines. Quant à l’huîtrier-pie il a le statut d’oiseau national.

Excursion à Mykines, paradis des ornithologues

Le lendemain, réveil relativement matinal car je dois me rendre à l’aéroport. Non pour rentrer en Europe mais parce que j’ai réservé un billet d’hélicoptère pour Mykines, l’île la plus à l’ouest des Féroé, située encore après Vágar. Le billet n’a pas du me coûter plus d’une vingtaine d’euros ! Si les prix sont si bas, et même presque symboliques, c’est bien sur parce que les vols sont subventionnés. Et ce pour permettre aux habitants des endroits les plus isolés de se déplacer plus rapidement quand ils en ont besoin. Mais les touristes peuvent en profiter aussi, avec certaines restrictions : il n’est pas possible de réserver un aller-retour dans la même journée mais seulement un aller simple. Si à la dernière minute il reste de la place dans l’hélico, on ne vous refusera probablement pas d’embarquer mais cela signifie qu’il vous faut impérativement prévoir un autre moyen de transport.

Je refais donc le trajet pour Vágar, cette fois en quittant Tórshavn par la route 52. Attention, celle-ci est seulement indiquée par son numéro, indiqué sur un minuscule panneau attaché à un réverbère ! L’hélicoptère nous emmène sur Mykines en quelques minutes et est l’occasion de survoler les deux îlots de Tindhólmur et Gáshólmur et de revoir Gásadalur du ciel. Nous sommes encore les seuls touristes, le bateau arrivant un peu plus tard. Moins préoccupé par l’idée de découvrir l’île dans la solitude que par celle de remplir mon estomac je me dirige droit vers l’unique café de l’île, dans la Kristianshus. Celle-ci est aussi une guest house mais sachez que les conditions y sont relativement spartiates. En été la Gula Húsið, ou maison jaune, fonctionne aussi comme hostel. Dans tous les cas, passer la nuit à Mykines est une expérience qu’il vaut mieux tenter si vous avez une certaine marge car par mauvais temps il se peut que ni l’hélicoptère, ni le bateau ne puissent circuler, vous scotchant sur place pendant plusieurs jours ! Et en voyant le port, il n’y a pas besoin de beaucoup d’expérience de la navigation pour comprendre pourquoi.

 

  • L’intérieur de la Kristianshus à Mykines.

 

En fait le café n’est pas encore officiellement ouvert à cette heure matinale mais la jeune étudiante islandaise qui travaille ici pour la saison me propose des pancakes que j’avale avec un café. Avant de me mettre en chemin pour le phare. Celui-ci est situé sur ce qui semble à première vue être l’extrémité ouest de l’île. Il s’agit cependant d’un îlot distinct d’environ 1km de long, Mykineshólmur (holm signifie simplement îlot), relié à l’île principale par un pont en bois. Celui-ci surplombe une impressionnante gorge où des milliers d’oiseaux ont élu domicile. 

Car Mykines est un véritable sanctuaire d’oiseaux marins, véritable paradis pour les ornithologues. Mais même sans s’intéresser particulièrement aux oiseaux, comment ne pas être fasciné par ces myriades d’oiseaux, tournoyant et piaillant continuellement ? Macareux, pétrels, fulmars, guillemots… Ce sont des dizaines d’espèces qu’on trouve ici. Mentionnons la présence de fous de Bassan sur Mykineshólmur, seul endroit où on les rencontre aux îles Féroé. Quant à l’huîtrier-pie il a le statut d’oiseau national. Si vous avez des jumelles, ne les oubliez pas !

Puis je refais le trajet dans l’autre sens, en croisant les touristes descendus du bateau. Il est maintenant l’heure du déjeuner et toutes les tables sont occupées à la Kristianshus. Après un tour rapide dans le village lui-même il me reste environ 1h30-1h45 avant le retour en ferry. Trop juste pour faire l’ascension du mont Knúkur (560 mètres) qui offre une vue sur la partie est de l’île, invisible depuis le village, ainsi que sur Vágar, Streymoy, etc. Malgré tout je pars dans cette direction et rebrousserai chemin à mi-parcours. Je suis presque seul car l’attraction principale est incontestablement la partie ouest de l’île. C’est cependant une balade intéressante qui permet de prendre de la hauteur et d’avoir une vue en enfilade de la partie ouest avec au loin le phare de Mykimeshólmur.

Finalement le ferry nous ramène à Sørvágur d’où un bus part une bonne demie-heure après pour l’aéroport où m’attend ma voiture. La coordination n’est pas optimale.

Dîner à Áarstova

 Après un passage à l’hôtel pour mettre des vêtements plus citadins, dîner au restaurant Áarstova (“la maison près du ruisseau”), qui occupe une demeure des années 1600 dans le vieux Tórshavn. C’est ici que naquirent les frères Janus et Hans Andrias Djurhuus, poètes féroiens célèbres.  Décor on ne peut plus hyggelig ou plutôt, après avoir demandé s’il y avait un équivalent féroïen à ce mot danois signifiant quelque chose comme cosy, accueillant (et en général éclairé à la chandelle !), hugnaligt ou hugaligt. C’est l’endroit idéal pour goûter à une cuisine gastronomique où des recettes relativement simples mettent en valeur des ingrédients premium. Surprise, la table voisine est occupée par les suédois avec qui j’ai fait la randonnée sur Kalsoy la veille.

  • Vue de Mykines depuis l'ouest, en direction du village.
  • Le pont qui relie Mykines au Mynineshólmur.
  • Vue depuis le pont entre Mykines et Mynineshólmur.

 

A la Nordic House un projet "géo-musical" avec Ólavur Jákupsson, musicien de Yann Tiersen

Dernière journée aux Féroé avant de reprendre l’avion pour Copenhague le lendemain. 

Visite à la Nordic House

Je commence la journée assez tard, fatigué par les journées bien remplies qui ont précédé. En fin de matinée je me rends à la Nordic house, centre culturel qui abrite entre autres des exposition temporaires. J’y regarde un film sur une étrange expérimentation à l’intersection de la musique et de la géologie. Des enregistrements réalisés avec du matériel sismologique - qui a capté dans le sol féroïen des sons issus de l’explosion d’une carrière ou bien produits en martelant le sol de coups de pierre - ont été mis en rythme par le groupe ORKA. Le résultat est diffusé à la fin du film. Puis je discute avec Ólavur Jákupsson, musicien féroïen membre d’ORKA, qui est présent sur place. Celui-ci m’explique que sa carrière musical le mène souvent loin des Féroé. Il fait aussi partie du groupe qui accompagne Yann Tiersen en live

Les falaises de Vestmanna

Après un déjeuner rapide, je dois me décider quant au programme de l’après-midi. Il est probablement un peu tard pour aller à Vestmanna. C’est pourtant un des highlights des Féroé. C’est dans cette ville de 1200 habitants que partait le ferry pour Vágar avant la construction du tunnel. Mais son intérêt touristique se trouve surtout dans les excursions en bateau qui en partent pour aller contempler les fameuses Vestmannabjørgini ou falaises de Vestmanna. Celles-ci se situent le long de la côte ouest de Streymoy, entre Vestmanna et Saksún, dont il a été question plus haut. Utilisées pendant l’été comme zone de nidification par d’innombrables oiseaux marins, elles sont avec Mykines un des meilleurs endroits pour y observer les volatiles. Quant aux falaises elles-mêmes, elles sont particulièrement impressionnantes, les plus hautes atteignant 600 mètres tandis que le vert vif des plaques d’herbe et de mousse dont elles sont parsemées forme un contraste saisissant avec le gris de la pierre. Les bateaux se faufilent dans des passages étroits entre les falaises et entrent même dans des grottes où le moindre son réverbère à l’infini. Les tours opérateurs vous encouragent à apporter votre propre instrument de musique !

En ferry pour Sandoy

De mon côté j’irai cependant passer l’après-midi à Sandoy, l’île juste au sud de Streymoy. L’embarcadère du ferry (Gamlaræt) se trouve sur la même route que celle qui mène à Kirkjubøur, à quelques minutes du centre de Tórshavn.

Le ferry passe à proximité de Hestur (“le cheval”), et s’y arrêtera même sur demande à certaines  heures. Cette île doit son nom à sa forme qui rappelle vaguement un cheval au repos. Elle compte à peine 40 habitants mais a pourtant sa piscine dont chaque habitant a la clé. En fait la construction de la piscine, qui date des années 70 était une tentative d’endiguer la dépopulation de l’île.  Les falaises à l’ouest de l’île servent d’habitat à des milliers d’oiseaux et en rendent la côte largement inaccessible. En été certains tours en bateau permettent de les voir. Sur l’île elle-même, la randonnée la plus intéressante est peut être celle qui consiste à monter sur la partie haute de l’île pour rejoindre Álvagjógv ou la "gorge des elfes", à l'ouest, d’où l’on a aussi une bonne vue sur Trøllhøvdi, le petit îlot au nord de Sandoy. Attention à ne pas prendre de risques inconsidérés en approchant la gorge.

Sa plus petite voisine Koltur, qu’on aperçoit derrière est encore plus étonnante. Elle semble suivre Hestur comme un poulain suit un cheval. Et c’est peut être l’origine de son nom qui serait à rapprocher de l’anglais colt (poulain). Depuis le ferry pour Sandoy, l’île tout entière ressemble à une grande pente herbeuse. De fait l’île est l’une des plus petites des Féroé avec seulement 2.5km² de superficie dont le Kolturshamar (478m) occupe une grande partie. Mais il se trouve quand même une partie relativement plane, moins visible, où est situé le village éponyme. Seulement deux familles, qui ne s’adressaient plus la parole depuis des décennies sans que personne ne se rappelât l’origine de la mésentente, y vivaient jusqu’en 1989 quand le village fut abandonné. En 1994 un couple vint s’y installer à nouveau et entreprit des travaux de rénovation. Aujourd’hui l’unique ferme en activité possède quelques vaches des Highlands, outre de nombreux moutons. Les anciennes maisons de tourbe de Heima í Húsi, bien restaurées, permettent de voir à quoi ressemblait un village viking aux alentours de l’an 1000. Il est question que l’île soit déclarée parc national. Il n’y a pas de service de ferry régulier pour Koltur mais l’hélicoptère a 3 vols prévus par semaine.

  • Un bateau près des falaises de Vestmanna, une des excursions les plus populaires des Féroé.  © Visit Faroe Islands / Daniele Casanova
  • L'île de Koltur vue de "profil".  © Visit Faroe Islands / Jakob Eskildsen

 

De la pointe sud, une vue superbe sur les deux Dimun.

Sandoy et un aperçu des îles du sud

Comparé aux autres îles, Sandoy est plus plane, plus verte et fertile, et sans doute aussi moins spectaculaire. Encore que les falaises à l’ouest de l’île soient impressionantes. 

Le ferry arrive au terminal de Skopun, petite ville qui n’a pas grand chose de remarquable hormis sa plus grande boîte à lettres du monde, aux couleurs de la poste féroienne, qui lui a valu une inscription au Guiness des records. Huit kilomètres plus loin, Sandur est la ville où sont basés l’office de tourisme et la plupart des services de l’île. Rien d’extraordinaire non plus si ce n’est une église en bois qui date du 19ème siècle mais qui se trouve sur un site archéologique important. Cinq églises l’ont précédée. 

De Sandur on pourra plutôt emprunter la piste de 3 km qui conduit à la baie de Søltuvik. Cette baie en croissant, avec sa plage de sable (attention n’imaginez pas une plage de sable fin) contraste avec les falaises et rochers habituels des Féroé. L’atmosphère de tranquillité qui y règne par beau temps est trompeuse car elle fut le théâtre de nombreux naufrages. A partir de Sandur, on peut aussi se rendre dans le petit hameau de Skarvanes à pieds en suivant le chemin côtier.   

De mon côté je continue jusqu’à Skarvanes en voiture. Je ne croise personne sur la route si ce n’est d’adorables poneys. Curieux, ils viennent “inspecter” ma voiture pendant une pause photo. En arrivant sur la côte la route  se rétrécit considérablement. Finalement j’arrive à Skarvanes, où l’on a une belle vue sur toutes les îles plus au sud. Juste en face, Skúvoy puis Stóra Dímun, Lítla Dímun et plus loin Suðuroy (voir plus bas). Je me contenterai de prende un peu de hauteur pour faire quelques photos. Mais en continuant, il est possible de possible de traverser l’île pour se rendre à pieds à Dalur (compter 1h30) ou à Húsavík, sur la côte est. Comme souvent aux Féroé les distances sont faibles mais le chemin escarpé ! Si vous n’avez guère de temps l’une comme l’autre peuvent être rejointes en voiture en faisant demi-tour pour rejoindre la route 30 puis après 2 km la 35 en direction Húsavík. En continuant sur la 30 on arrive à Skálavík qui abrite un hôtel confortable.

Húsavík est surtout connue pour ses ruines d’une ferme médiévale ayant appartenu à la riche Guðrun Sjúrðar­dóttir alias la Dame d’Húsavík, qui avait également des possessions en Norvège et aux Shetland. On raconte qu’elle était si sévère qu’elle fit enterrer vivantes deux de ses servantes. L’origine de sa fortune fait aussi l’objet de plusieurs légendes.

Après Húsavík, une route étroite qui surplombe les falaises mène à Dalur, située dans une vallée encaissée. De là il est possible de prendre la toute petite route construite pendant la 2ème guerre mondiale pour se défendre d’une attaque allemande ; elle passe à l’ouest du point le plus haut, Skúvoyarfjall (354m) et s’arrête à quelques centaines de mètres des falaises de Skorin, à la pointe sud de l’île. De là on a une vue superbe sur les îles voisines dont on donne maintenant un bref aperçu.

C’est sur l'île de Skúvoy qu’habitait Sigmundur Brestisson, héros des Sagas féroïennes qui introduisit le christianisme dans les îles en 999. Poursuivi par ses ennemis, celui-ci dut se jeter à la mer avec ses compagnons, du haut des falaises d’Høvdin, le cap nord de l’île. Epuisé et en hypothermie, il survécut seul et échoua à Suðuroy, pourtant bien plus au sud. Las, ce fut pour être tué par Tórgrímur le Mauvais qui lui vola son anneau en or. D’après la tradition une croix marque sa tombe dans le cimetière de la vieille église. Aujourd’hui Skúvoy est accessible en ferry depuis Sandur et est nettement plus paisible. Mais si vous allez voir les nombreux oiseaux près d’Høvdin, justement, méfiez-vous des attaques des sternes arctiques !

 

 

Lítla Dímun et Stóra Dímun, la grande et la petite Dímun sont parmi les plus inaccessibles des îles de l’archipel. Le pourtour des îles est, dans sa partie inférieure, entièrement constitué de falaises. A Stóra Dímun, celles-ci ne font jamais moins de 100 mètres de haut et y faire accoster un bateau est une manœuvre périlleuse. Il faut alors gravir un escalier taillé dans la falaise pour gagner l’unique ferme de l’île. Celle-ci est entourée d’un mur renforcé par des cables d’acier tant le vent est violent les jours de tempête. En dépit de ces conditions extrêmes, Stóra Dímun est habitée depuis 1000 ans ! Pour un reportage intéressant (en anglais) sur Stóra Dímun, on pourra consulter cet article «A journey to the edge of Europe». Stóra Dímun est aujourd'hui desservie en hélicoptère.

Quant à Lítla Dímun, c’est la plus petite île de l’archipel et la seule à n’avoir jamais été habitée, si ce n’est par des moutons. Sigmundur Brestisson, mentionné plus haut, y faisait paître les siens il y a un millénaire. On y trouvait même une race particulière de moutons jusqu’en 1844, quand on abattit les trois derniers spécimens pour les empailler. Ceux-ci sont aujourd’hui visibles au musée historique de Tórshavn. On suppose que ces moutons, semblables en apparence aux actuels moutons de Soay, qui vivent dans des conditions relativements similaires sur cette île écossaise de 1 km2, avaient été amenés par les ermites irlandais qui furent probablements les premiers habitants des îles.

Finalement Suðuroy est la plus grande et la plus intéressante des îles du sud de l’archipel, et mérite qu’on lui consacre un article à l’occasion d’un prochain voyage ! Elle est située à 2 heures de ferry de Tórshavn de sorte qu’il vaut mieux y passer au moins une nuit sur place. Plus d’infos sur le site de visitsuduroy.fo

  • Le restaurant Koks, fleuron gastronomique des Féroé.

 

Dîner au restaurant Koks

Mais je conclurai mon récit sur le dîner au restaurant Koks de l’hôtel Føroyar, où je me dépêche de rentrer en reprenant le ferry de Skopun. Il constitue le fleuron gastronomique des Féroé. Son jeune chef Poul Andrias Ziska, originaire des Féroé, y propose une cuisine nordique dans la lignée de René Redzepi, le chef du célèbre Noma de Copenhague. Poul Andrias Ziska a lui-même fait ses classes à Copenhague chez Géranium, classé 2-étoiles au Michelin.

Le menu dégustation nous offre de multiples surprises avec une attention particulière à la présentation, souvent aussi originale que les recettes elles-mêmes. Le cabillaud séché est ainsi servi sur des arêtes de poissons. Pendant ce temps on regarde la nuit qui tombe sur Tórshavn et la lumière du M/S Nöronna qui quitte le port pour rentrer à Copenhague.  

  • Poisson séché. Dîner au restaurant Koks.
  • Dîner au restaurant Koks, un haut lieu de la nouvelle cuisine nordique.
  • Le long de la route vers Skarvanes sur Sandoy.
  • Tórshavn et au fond l'île de Nolsoy, vus depuis l'hôtel Føroyar.
Photos : © Yonder /DB
Les Féroé en chiffres 1/4
  • 18 îles principales
  • 19 tunnels plus 3 en construction
  • ca. 49000 habitants dont 12400 à Tórshavn
  • 1400 km² : c est 73 fois moins que l'Islande et 1500 fois moins que le Groenland !
Quelques distances 2/4
  • les plus proche voisins sont les îles Shetland (285km), Orcades (300km) et l’Ecosse (320km)
  • techniquement c’est toutefois l’île de North Rona, Ecosse qui est la plus près (260km) mais elle est aujourd’hui inhabitée !
Quelques distances 3/4
  • les côtes islandaises sont à 450km
  • Irlande et Norvège sont toutes deux à 670 km
  • le Danemark est à 990km
Distances en voiture 4/4

De Tórshavn à...

  • Vágar (aéroport) : 47km
  • Vestmanna : 39 km
  • Klaksvík (2ème ville des Féroé sur l’île de Borðoy) : 75 km
  • Viðareiði , la ville la plus au nord-est : 94 km