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Alain MauriceAlain Maurice, Le mercredi 11 mai 2022
Notre avis

Venise et sa lagune en mode croisière

Cliché, Venise ? Pas forcément. Musée à ciel ouvert, la Sérénissime ne se limite pas à ses incontournables aux couleurs de carte postale. Il est bon parfois de lui ôter son masque de carnaval pour découvrir son vrai visage, loin du tumulte du Palais des Doges et de la place Saint-Marc.
  • Restaurant Terrazza Danieli © Brando Barré
    Restaurant Terrazza Danieli © Brando Barré
  • MS - Michelangelo- CroisEurope © Alexandre Sattler
    MS - Michelangelo- CroisEurope © Alexandre Sattler
  • Chioggia © Comune di Chioggia
    Chioggia © Comune di Chioggia
  • Chioggia © Comune di Chioggia
    Chioggia © Comune di Chioggia
  • Eglise Madonna dell'orto © Vela Spa
    Eglise Madonna dell'orto © Vela Spa
Le spectacle est partout. Les eaux de Venise ont donné naissance à un style de vie unique au monde !

JOUR 1

09h – Première étape : la Bellissima

À Venise, on peut visiter le Palais des Doges, hymne à la gloire de la cité lacustre, flâner au gré des canaux ou roucouler place Saint-Marc avant de franchir le Pont des Soupirs… La ville réserve des merveilles plus inattendues. Pour cela, rien de mieux que d’embarquer sur le vaporetto de la ligne 1. Il parcourt le Grand canal, la « rue principale », zigzagant d’une rive à l’autre. Autour de nous, une effervescence de bateaux-taxi, de bateaux-police, de bateaux-ambulances, de gondoles et de palais en pierre blanche d’Istrie. Le spectacle est partout. Les eaux de Venise ont donné naissance à un style de vie unique au monde ! On descend à l'embarcadère Ca'd'Oro. Les ruelles du sestiere (quartier) de Cannaregio ont beaucoup d’histoires à raconter. Celle des juifs qui ont été obligés de s’y établir dès 1516, en faisant le plus ancien Ghetto du monde. Celle d'un des plus grands peintres de Venise, Jacopo Robusti, dit Tintoretto, Le Tintoret. L’église de la Madonna dell'Orto recèle deux des plus belles toiles du maître (L'adoration du Veau d'or et Le Jugement Dernier), et son tombeau.

  • Venise © Alain Maurice
    Venise © Alain Maurice


Cap sur le Rialto. Le clocher, l’horloge et le porche de la petite église de San Giacomo, une des plus anciennes de Venise (1152), forment un ensemble architectural unique. La statue de Goldoni, inventeur de la comédie italienne moderne, domine le campo San Bartolomeo. Au même emplacement depuis le début du IXe siècle, le marché déborde de fruits, de légumes et d’épices. En face, la Pescheria (marché aux poissons) et son large chapiteau. L'offre est colorée : dorades, poulpes, sèches, oursins et poissons de la lagune. On continue vers la fondamenta della Misericordia… en gondole ! Les Vénitiens ne la prennent jamais, sauf s'il s'agit du traghetto, deux rameurs et une petite dizaine de passagers debout. Rapide (2 minutes) et moins chère que le vaporetto, il sert à traverser le Grand Canal là où il n’existe pas de pont. Au détour de ruelles étroites et de commerces à l'ancienne, la Misericordia nous conduit, derrière l’Arsenal, au Castello, l’un des plus agréables et des plus authentiques quartier de la cité. À cette extrémité de Venise, qui n’est qu’à une vingtaine de minutes à pied de la Piazza San Marco, on se sent loin, très loin de tout…

  • Venise © Alain Maurice
  • Venise © Alain Maurice

 

12h – L’heure de s'installer en terrasse

À la terrasse d’un bacaro (bar traditionnel), en sirotant une « ombra », autrement dit un petit verre de vin : Prosecco aux bulles légères ou Fragolino au goût prononcé de fraise… À l'origine, les vendeurs installaient leurs tonneaux sur la place Saint-Marc, à l'ombre du campanile, et se déplaçaient au fil de la journée pour garder la boisson au frais ; d'où l'habitude d'associer l'ombre au verre de vin. Il Cantine del Vino già Schiavi (fondamenta Nani), bacaro typiquement vénitien, nous fait découvrir la tradition des tramezzini et des cichetti, petites tartines généreusement garnies de crème de morue séchée (bachelà mantecato), de sarde in saor (sardines marinées dans du vinaigre) ou simplement de légumes grillés.

Une mise en bouche avant de s'attabler pour un déjeuner lagunaire à l’Osteria Anice Stellato, fondamenta della Sensa. Cette étape, qui n’est pas comprise dans notre forfait, vaut qu’on s’y arrête. Venise a sa cuisine, à base d’asperges, de fleurs de courgette, de castraure, petits artichauts pourpres cultivés sur l'île de Sant'Erasmo, le potager de Venise ; de seiches à l’encre, de pâtes aux palourdes, de raviolis au guanciale (joue de cochon séchée), de folpeti (petits poulpes), de polenta e schie, une crevette que l’on ne trouve que dans la lagune… En mars, les moeche, crabes capturés lors de leur mue, sans coquilles, sont frits et dévorés entier !

  • Bar sur un canal de Venise © Pierre Gunther
    Bar sur un canal de Venise © Pierre Gunther

 


Mais aussi

  • Ca’ d’Oro alla Vedova pour ses polpette (boulettes de viande) fantastiques. Page Facebook 
  • L’Osteria Bancogiro pour son baccalà, une crème de morue au lait sur un carré de polenta, et sa mozzarella in carrozza, beignet de fromage et anchois. Site Web
  • Il Ridotto pour ses spaghettis noirs, oursins, poivron confit et chou frisé. Site Web
On peut aussi faire l'expérience du Florian, sur la piazza San Marco, le plus célèbre des « caffès » vénitiens, fréquenté jadis par d’illustres écrivains.

18h – Retour à Venise pour la notte

Le soleil se couche sur la lagune. Sur le pont du M/S Michelangelo, c’est l’heure de l'aperitivo, un rituel qui fait partie de l'ADN des Vénitiens. Le Spritz, célèbre breuvage orangé à la fraîcheur amère, est de toutes les soirées. Un concentré de dolce vita ... On raconte qu'il est né en lagune lors de l'occupation austro-hongroise au XIXe siècle. La recette : du vin blanc et un brin d'eau pétillante auquel on ajoute du bitter. Une olive, une tranche d'orange ou de citron pour la touche finale. Salute !

Après un dîner-croisière en bonne compagnie — les traditions culinaires vénitiennes, et plus largement italiennes, sont abordées sur le bateau —, quand la magie du clair de lune opère, on a le choix : lire son bouquin sur les confortables couchettes, bercé par les eaux ; ou aller boire un Bellini au Harry's Bar. Après-guerre, Giuseppe Cipriani, patron de l’établissement, imagina un cocktail à base de Prosecco et de pêches jaunes de Sant'Erasmo. Le nom du cocktail est un hommage au peintre vénitien de la Renaissance, Giovanni Bellini, dont l'un des tableaux a inspiré le mixologue ! Ou encore pousser la porte-tambour du Danieli, « le palace » par excellence et une attraction à lui seul. Et s’offrir, au bar Dandolo (lustres en verre de Murano, plafonds ornés de feuilles d’or et fenêtres en ogives), ou sur le roof-top, face à la Punta della Dogana (où sont présentées une partie des œuvres d'art contemporain de la collection François Pinault), un Vesper Martini, le cocktail inventé spécialement pour l’agent 007. James Bond est un habitué des lieux… On peut aussi faire l'expérience du Florian, sur la piazza San Marco, le plus célèbre des caffès vénitiens, fréquenté jadis par d’illustres écrivains. La décoration de ses salons, inchangée depuis 1858, est somptueuse. Les garçons portant un papillon noir prennent la commande, les papillons blancs servent les clients.

  • Coucher de soleil à Venise © Alain Maurice
  • Hôtel Danieli - bar Dandolo © Alain Maurice

 

JOUR 2

10h - Cap sur l’île aux dentelles et celle des souffleurs de verre

Il est temps de « prendre le large », direction le nord de la lagune. Les « bricole », grands piliers de chêne assemblés par trois, délimitent les chenaux de navigation. Nous accostons sur l’île de Mazzorbo. Un campanile de la Renaissance plante le décor. Quelques bâtiments dissimulent un vignoble dont les origines remontent au XIVe siècle. Mazzorbo est reliée à l’île de Burano par un petit pont en bois. Ici, pas de palais somptueux mais des maisons de pêcheurs aux façades pimpantes qui s’admirent sur l’eau des canaux. Elles étaient peintes de couleurs vives pour être repérées par temps de brume. La tradition perdure. Burano est connue aussi pour ses dentellières. Depuis 400 ans, elles veillent, dans l’embrasure des portes, sur le fameux « punto in aria », un point de dentelle qui séduisit Catherine de Médicis.

À quelques minutes de vaporetto, Murano. L’île abrita les amours de Casanova avec des nonnes du couvent Santa Maria degli Angeli. Aujourd’hui elle est célèbre pour son verre, héritage du XIIIe siècle, lorsque les verriers de Venise furent contraints de déménager leurs fours de la Sérénissime, pour cause d’incendies répétés, et pour préserver leur savoir-faire de l'appétit des espions français. Le long des canaux, on visite une succession d’ateliers et de boutiques proposant lustres à pampilles, vaisselle baroque, vases, bijoux … ; on observe les souffleurs à l’ouvrage et on apprend que les premiers verres solaires furent créés ici pour protéger les yeux des doges.

  • Buranno © Alain Maurice
  • Buranno © Alain Maurice

 

 

JOUR 3

10h – En route vers le sud

C’est le grand départ pour « la laguna sud ». Trois heures de navigation jusqu’à Chioggia. La Sérénissime s’offre tout entière : le campanile de la basilique Saint-Marc, le Palais des Doges, l’Hôtel Danieli, San Giorgio Maggiore surveillant le passage des bateaux sur le Grand Canal. Kevin, le commissaire de bord, nous raconte que depuis le XIIIe siècle plusieurs rivières ont été détournées, sans quoi la lagune serait devenue une plaine alluviale. Et qu’ils sont aujourd’hui des centaines, des milliers sûrement, pêcheurs, agriculteurs, vignerons, archéologues à y vivre et à en vivre. À gauche, San Servolo a accueilli, jadis, un monastère ; puis un hôpital psychiatrique. Aujourd’hui l’île abrite la Venice International University. Le Lido, mince banc de sable de 12km de long, fut « découvert » par la cour d’Autriche au XIXe siècle. L’île était inhabitée. Maximilien de Habsbourg fit édifier une station balnéaire, parmi les plus élégantes et les plus renommées d’Europe. À droite, l'île des Roses, couramment appelée Sacca Sessola, fut achetée en 2000 par le groupe hôtelier Marriott pour y bâtir un hôtel de luxe.

  • Lagune de Venise © Antonio Molinari
    Lagune de Venise © Antonio Molinari


San Clemente a longtemps servi de halte aux pèlerins en route vers la Terre sainte. Elle est aujourd’hui le San Clemente Palace, refuge doré, là aussi, pour gens aisés. Sur la lagune, il y a des îles inhabitées. En face du Lido, San Spirito a longtemps caché des trésors artistiques. Actuellement c’est un terrain vague. Le retable du Titien, La Descente du saint Esprit, a été déménagé dans l’église de la Salute, à l’entrée du Grand canal. À l’abandon, l’île du Lazzaretto Vecchio a été réhabilitée et rendue aux touristes en 2014. Poveglia, en revanche, risque d’être laissée-pour-compte encore un bout de temps. Elle est considérée comme l’île la plus hantée au monde. « Quand un homme diabolique meurt, il se réveille à Poveglia », raconte un proverbe local … La lagune se fait plus sauvage. Des bancs de sable servent de refuge aux oiseaux migrateurs. Des cabanes de pêcheurs sur pilotis apparaissent, les « casone » comme on les appelle en dialecte vénitien

JW Marriott Venice Resort & Spa
227 clés, à partir de 400€ la nuit.
Isola delle Rose, Laguna di San Marco, Venise 30133 Italie
Site Web

San Clemente Palace Kempinski Venice
196 clés, à partir de 600€ la nuit.
Isola S. clemente, 1, 30124 Venezia VE, Italie

Site web

14h – Chioggia, notre dernière étape

On aurait pu partir en bus jusqu’à Padoue. C’était une option. On a choisi de rester l’après-midi à Chioggia, intrigué par un article paru il y a quelques semaines dans le New York Times, affirmant que c’était la ville à visiter en priorité en 2022 si l’on souhaite pratiquer un tourisme responsable ! Il n’y a pas de Palais des Doges, pas de Piazza San Marco, pas d’opéra ni de gondoles, mais des bateaux de pêche romantiques, des canaux et des petites ruelles bordés de maisons étroites avec le linge qui pend aux fenêtres, des jolis cafés et des restaurants de poissons fraîchement pêchés. La « piccola Venezia » comme elle est surnommée, fondée avant la Sérénissime et immortalisée par Goldoni, est plus modeste.

Pour capturer son âme, rien de mieux qu’une lente promenade sur le pont Vigo (neuf jolis ponts enjambent le canal Vena, la principale artère) et le Corso del Popolo, bordé de belles demeures. Dans l’ancienne église San Francesco fuori le mura, un petit musée raconte la vie maritime de la ville. Les hommes de Chioggia sont pêcheurs depuis des générations. Le pittoresque marché aux poissons est un pur moment de bonheur ! Entre le Corso del Popolo, le canal Vena et le Palazzo Granaio, on ne peut manquer ses rideaux rouges et sa belle entrée. Piazzetta Vigo, Chioggia semble plonger dans la mer vénitienne.

  • Chioggia © Commune di Chioggia
    Chioggia © Commune di Chioggia

 

Nos remerciements à italia.it et veneziaunica.it

Pratique

CroisiEurope relance ses croisières à Venise à bord du M/S Michelangelo. 5 jours à bord (dont 4 nuits) et des temps de navigation qui n’excèdent pas 2 ou 3 heures. À partir de 595€ par personne, hors acheminement à Venise.

Site Web

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