Mathieu Belay, Le mardi 11 juillet 2017
Restaurants

Paris : On a testé OKA, nouveau restaurant gastronomique franco-brésilien

Depuis quelques semaines, le chef Raphaël Régo réinvente la cuisine franco-brésilienne dans son nouveau restaurant du 5ème arrondissement, OKA. La table, promise à un très grand succès, n’attend plus que votre réservation.
  • À l'intérieur du Restaurant OKA : salle à manger confortable, touches colorées et spectaculaire cuisine vitrée © Julie Limont
    À l'intérieur du Restaurant OKA : salle à manger confortable, touches colorées et spectaculaire cuisine vitrée © Julie Limont
  • L'équipe d'OKA rassemblée autour de son chef Raphaël Régo en cuisine © Julie Limont
    L'équipe d'OKA rassemblée autour de son chef Raphaël Régo en cuisine © Julie Limont
La réouverture d'OKA dans une version plus intimiste et plus gastronomique tenait tout particulièrement à cœur à cet ancien de l’École Ferrandi.
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Le pitch d'OKA

OKA et Raphaël Régo sont deux noms familiers de ceux qui fréquentent assidument les bonnes tables du très gourmand 9ème arrondissement. C’est en effet dans ce paradis pour foodies que le chef brésilien Raphaël Régo, originaire de Rio de Janeiro, passé du marketing auxfourneaux après un coup de foudre culinaire à Sydney, a ouvert son premier restaurant brésilien en 2014, OKA. Depuis, son restaurant de la Rue de la Tour d’Auvergne a laissé sa place à un bistrot brésilien plébiscité par la critique comme par le public, Maloka Alma Brasileira. Fort de ce succès, le chef de 33 ans a même très récemment ouvert un second Maloka, entièrement consacré au barbecue, Maloka Fogo e Brasa au 1 bis rue Augereau, dans le très chic 7ème arrondissement.

Mais si un projet tenait tout particulièrement à cœur de cet ancien de l’École Ferrandi, c’est celui de la réouverture de son OKA originel, sur les hauteurs du 5ème arrondissement, dans une version plus intimiste (20 couverts seulement), plus gastronomique et poussant encore plus loin le dialogue qu’il a initié entre les cultures gastronomiques brésiliennes et françaises. C’est ce restaurant sentant encore le neuf que nous venons d’essayer lors d’un déjeuner remarquable à tout de point de vue, plein de promesses pour l’avenir.
 

  • Portrait du chef Raphaël Régo © Julie Limont
Raphaël Régo imagine une cuisine d’auteur ambitieuse, centrée autour du meilleur des deux identités culinaires.

 

Dans l’assiette

Après une série d’amuse-bouches stupéfiantes de raffinement et de recherche, les véritables hostilités commencent avec une émulsion de caïpirinha travaillée avec du jambu, une plante aromatique proche de la menthe venue d’Amazonie. « Elle est utilisée par les tribus amazoniennes pour soigner les blessures, grâce à ses vertus anesthésiantes » nous explique ainsi le maître d’hôtel. Avant de préciser qu’il était ici utilisé pour « nettoyer le palais » avant que le repas ne débute. « Les tribus utilisent traditionnellement le jambu pour se purifier le palais avant un repas. ».

Une fois notre palais rafraîchi – et effectivement un brin anesthésié pour quelques instants - nous voici partis pour un périple culinaire mémorable dans les terres natales de Raphaël Régo. Mais attention, pas question de faire un aller-simple pour le Brésil. L’idée du chef et patron d’OKA va bien plus loin que celles de proposer un simple restaurant brésilien au cœur de la capitale. Au-delà de ça, il imagine une cuisine d’auteur ambitieuse, centrée autour du meilleur des deux identités culinaires. Faire dialoguer les meilleurs poissons de la côte Atlantique (française !), les meilleures viandes des terroirs hexagonaux avec des dizaines de produits brésilien, qu’il a soigneusement sourcés lors d’un long voyage initiatique aux confins des terres amazoniennes. Marchant sur les traces du célèbre chef brésilien Alex Atala [ayant fait l’objet d’un épisode de Chef’s Table de Netflix, il est l’un des meilleurs chefs du monde selon les World’s 50 Best, NDLR] dont Raphaël Régo nous confie qu’il lui a ouvert des portes, lui permettant de développer plus vite son réseau de producteurs, le chef d’OKA ne fait donc pas seulement de la cuisine. Depuis la France, il inscrit sa démarche dans un écosystème vertueux et équitable en important directement des dizaines d’ingrédients, auprès de petits producteurs pour lesquels l'exportation est encore souvent toute nouvelle. D'ailleurs, plus qu'un simple client pour les agriculteurs avec lesquels il travaille, Raphaël Régo se définit comme un véritable partenaire pérenne.
 

  • Émulsion de caïpirinha, jambuji, pour se nettoyer le palais avant de débuter le déjeuner © YONDER.fr


Évidemment, si cette démarche est économiquement et intellectuellement passionnante, elle ne saurait être aboutie sans un véritable talent en cuisine. Assiette après assiette, plat après plat, Raphaël Régo nous a prouvés, lors d’un déjeuner éblouissant de créativité et d’audace, qu’il était capable de faire vivre un extraordinaire pont culinaire entre la France et l’Amazonie. Millefeuille de manioc cuit pendant 48 heures, pince de homard et taperebá (une sorte de goyave autochtone d’Amazonie), foie gras cuit au thermoplongeur, saisi au chalumeau, accompagné de maïs frais, de goyave et d’un bouillon coco, turbot de ligne et son cœur de palmier frais cuit sous vide, jusqu’à une pintade du Périgord servie avec des blettes, du manioc torréfié, des petits pois à peine cuit, du piment biquinho et le condiment tucupi negro, les compositions sont toujours parfaitement équilibrées, les saveurs le plus souvent surprenantes, la précision – des cuissons, des assaisonnements, des épices – simplement diabolique.

Jusqu’au bouquet final sucré imaginé par le chef-pâtissier Quentin Lechat : un crémeux de citron ultra frais d’un côté, un dessert tout-chocolat (plusieurs niveaux d’amertume de cacao et une dizaine de variétés de piments), époustouflant de subtilité de l'autre. Voilà qui vient conclure de façon bluffante un déjeuner de très haute volée et plus que prometteur pour l'avenir.

  • Millefeuille de manioc cuit 48h, beurre de Monteigo de Garrafa © YONDER.fr
  • Pince de homard, taperebá, toucoupi © YONDER.fr

 

La cuisine vitrée, du sol au plafond, sur toute la largeur du restaurant et ouverte sur la rue, est absolument sensationnelle.

 

Dans la salle

Décor à la fois très élégant, spacieux, lumineux et coloré (bleus profonds, jaunes d’or, ambres chauds) imaginé par l’architecte d’intérieur Caroline Tissier, grande spécialiste de l’aménagement de restaurants (elle a ainsi signé les intérieurs des très beaux restaurants de David Toutain et Akrame Benallal). La cuisine vitrée, du sol au plafond, sur toute la largeur du restaurant et ouverte sur la rue, est absolument sensationnelle. Arrangements floraux de toute beauté. Seul regret : une température en salle un brin élevée en ces jours caniculaires. Rien de grave pour autant.

Le service

Ultra-pro, emmené par une équipe ayant fait ses armes dans les meilleurs restaurants de France (L’Ambroisie, L’Astrance, Thoumieux époque Jean-François Piège...), le niveau de service est celui d’un étoilé très confirmé plutôt que de celui d’un « gastro » lambda. Même si ,à notre sens, davantage de décontraction et de modernité seraient les bienvenues pour coller à l'identité du lieu. On notera tout de même que la générosité de Raphaël Régo – qui a tendance à aller au-delà du nombre de plats indiqués sur le menu – implique de rester un moment à table (au moins 2h-2h30 si vous partez sur un service en 6 temps ou plus). Pour un déjeuner ou un dîner rapide, OKA n’est peut-être donc pas l’adresse qu’il vous faut, gardez-le en tête avant de booker.

  • Foie gras cuit au thermoplongeur et saisi au chalumeau, maïs frais, goyave, noix de cajou d'Amazonie, bouillon coco © YONDER.fr
  • Crémeux citron, cœur d'avocat, chocolat blanc, écorce de yuzu, citron caviar, neige acidulée © YONDER.fr

 

Foncez-y cet été avant que le restaurant ne soit littéralement pris d’assaut à la rentrée !

 

L’addition

Au déjeuner, deux options :

- le Menu Escale (en 3 temps) : 35€ (50€ avec l’accord mets-vins)
- le Menu Traversée (en 6 temps) : 55€

Au dîner, un seul menu carte blanche, le Menu Odyssée (en 9 temps) à 75€ par tête (120 € avec l’accord mets-vins) est proposé. Bon à savoir : la carte des vins propose des flacons particulièrement accessibles (dès 25-30€).
Compte tenu du niveau de la prestation décrite ci-dessus, le rapport qualité-prix est exceptionnel, sans aucun doute l’un des tout meilleurs de Paris pour cette typologie d’établissement.

Ce qu’il faut retenir / Notre verdict

On l’attendait de pied en forme, nous n’avons pas été déçus un seul instant, bien au contraire. Après seulement quelques semaines d’ouvertures et un déjeuner d’essai plus que concluant, OKA est en très bonne position pour revendiquer le titre de l’ouverture la plus marquante de l’année, a minima sur le segment gastronomique. Ce que nous avons vu, entendu et dégusté lors de ce déjeuner nous laisse penser que Raphaël Régo décrochera facilement une première étoile dans l’édition 2018 du Guide Michelin. À plus longue échéance, un deuxième macaron n’aurait d’ailleurs rien d’extravagant. En conclusion, foncez-y cet été avant que le restaurant ne soit littéralement pris d’assaut à la rentrée !

  • Détails de décoration © YONDER.fr
  • Raphaël Régo devant son restaurant © Julie Limont

 

PRATIQUE

Restaurant OKA

1, rue Berthollet
Paris 5ème - FRANCE

Horaires
Ouverture du mardi au samedi, déjeuner et dîner

Informations et réservations
Téléphone : +33 (0)1 45 87 16 17
Plus d’informations et réservation sur le site Web d’OKA.