On a atterri à l'Amangiri dans l'Utah, un hôtel digne d'une autre planète
Ambiance
Nous sommes dans le sud de l’Utah, près de la frontière avec l’Arizona. La ville de Page est sortie de terre dans les années 1950, lorsque l’on érigea la centrale hydroélectrique de Glen Canyon. Des centaines de sites contenant des artefacts amérindiens furent découverts lors des fouilles précédant la grande inondation… et l’apparition du Lake Powell. Les 25 minutes en voiture depuis le petit aéroport municipal offrent un aperçu de la région : canyons spectaculaires, cheminées de fées étranges, formations rocheuses surnaturelles ; palette de sable, de rouille et de vermillon, ciel bleu sans limites. Au loin des escarpements énigmatiques. Nous sommes au pays des merveilles géologiques, à la lisière du Parc national de Grand Staircase-Escalante, près de 8 000 km2 de terres protégées, la dernière zone cartographiée des États-Unis. A première vue, tout est désertique. Pas une âme qui vive. L’aridité à l’état brut. On a l’impression d’avoir atterri sur une autre planète, et l’on sait déjà que l’on va vivre quelque chose de singulier.
Le pitch | L’isolement d’Amangiri, un argument de vente
Une petite route mène à un simple portail, pas de porte d'entrée grandiose. L’interphone grésille, l'expérience Amangiri (« montagne paisible » en sanskrit) commence. Arriver dans cet hôtel qui fait tourner les têtes, c'est comme bénéficier d'une dispense pour visiter la zone 51. La propriété est seule au monde, au milieu de 370 hectares de nature sauvage (et privée). L’isolement d’Amangiri est l’un de ses arguments de vente. Au pied de falaises formées de dunes fossilisées il y a plusieurs millions d’années, bordée de mesas et de broussailles sèches, l’architecture géométrique est étrangement à l'aise. Mélangé à la terre du désert, leur béton ressemble au grès sur lequel les peuples autochtones ont gravé des pétroglyphes.
Nous sommes à la frontière du plus grand territoire amérindien du pays, sur les terres séculaires du peuple Navajo. Leurs traditions sont un élément clé de la propriété, conçue par un trio d'architectes de Phoenix, Marwan Al Sayed, Wendell Burnette et Rick Joy. Bois massif, pierre, designs naturels sont savamment orchestrés. Des lucarnes carrées évoquent les hogans, les maisons traditionnelles. Aucune démesure, le luxe est discret, impossible de rivaliser avec la beauté des extérieurs ! Amangiri reflète le ciel, le soleil, les falaises. Le crépuscule se colore en rose. La nuit tombée, incroyablement sombre, on compte les étoiles de la Voie Lactée.
Comment est l’hôtel ?
Retour sur terre. Nous sommes dans un temple de l'architecture topographique et contemporaine. Les bâtiments sont de plain-pied, deux branches en angle droit partant du lobby accueillent les chambres. Les architectes se sont référés à la géométrie des falaises, orientant les murs et les ouvertures pour offrir des vues uniques. Des espaces sont inondés de lumière, d'autres conçus pour l'ombre. Les paysages, exposés à chaque tournant, font croire que des tableaux sont accrochés en trompe-l'œil, et nous frappent par leur beauté irréelle à chaque apparition.
Une grande salle vitrée sert de réception, de salon, bibliothèque et restaurant. L’artiste en résidence, Ulrike Arnold, y a accroché ses œuvres, peintes à même le sol, en extérieur, avec les minéraux collectés sur le domaine puis broyés. De vraies extensions du paysage, des happenings qui rendent hommage à la nature. « C'était la saison des pluies, une tempête a eu lieu et j’ai laissé une toile dehors. Comme la peinture n'était pas sèche, du sable s’est collé dessus. Une autre fois, pendant la nuit, un animal a grignoté un bout de la toile. J'aime intégrer l'instant, la coïncidence au tableau », explique-t-elle. Il y a des tables un peu partout pour déjeuner, dîner, prendre le café, une cave à vins. On regarde les chefs cuisiner, les cheminées crépiter en hiver, le soleil se coucher sur la roche couleur sang, ou les montagnes saupoudrées de neige. On a le temps de se remémorer les expériences vécues pendant la journée : la visite des slot canyons (Antelope Canyon, Rattle Snake et Owl’s canyon) accompagnée d’un guide Navajo qui a grandi ici. L’accès est exclusif, on est seuls à découvrir des artefacts Indiens, des pétroglyphes, et la majesté des lieux. Un grand moment.
Autre pièce maîtresse, la piscine. Les publications sur les réseaux sociaux le confirment. Elle rivalise avec une formation rocheuse de plusieurs millions d’années autour de laquelle elle s’enroule. Des transats bordent le périmètre, des oiseaux viennent boire tôt le matin. L’endroit idéal pour prendre son petit déjeuner très tôt, lorsque le décalage horaire se fait encore sentir.
Alors que l’on décide de se lancer sur un chemin de randonnée, vers la Grotte de la flèche brisée (Broken Arrow Cave, l’un des sites archéologiques majeurs de la région, se situe sur le terrain de l’hôtel), une fine pluie de chaleur voile le coucher du soleil, et un double arc-en-ciel se forme contre les nuages noirs d’encre. La lumière est incandescente et tout prend son sens. Notre guide Navajos nous avait raconté l’après-midi même la légende l’arc-en-ciel. Le plus visible est fait pour être vu des vivants, tandis que l’arc-en-ciel secondaire, plus translucide et aux couleurs inversées, est visible pour l’autre monde. Tout est trop parfait, la nature nous fait un clin d’œil.
Et les chambres ?
Le minimalisme, élémentaire et apaisant, se poursuit dans les 34 suites : meubles en bois brut et acier, sols en pierre blanche, carrelage sauge sauvage dans les salles de bains, murs en béton. Ce qui n’interdit pas une certaine opulence : 93 m2 pour la suite standard Mesa View, la plus petite. Pour une rockstar experience, l’Amangiri (348 m2) est dotée d’une cour privée et d'une piscine de 20 mètres avec marches flottantes. Depuis son ouverture, le resort est un repère de célébrités… La plupart des suites disposent de terrasses avec cheminées. Le spot pour compter les anneaux de Saturne.
D’immenses baies vitrées séparent les lits plateforme du paysage ; les salles de bains sont grandes ouvertes. Tout se confond, le dedans, le dehors, le béton poli, le sédiment des canyons. Le hozho, la « voie de la beauté » chez les Navajos, a été mis en application ici. Il insuffle paix, harmonie et beauté cosmique. Le service est invisible, l’intimité totale. Il y a aussi Camp Sarika, à 5 mn en voiture. Dix tentes disposent d'une ou deux chambres, d'un salon, d'un bar, d'une terrasse, d’une piscine, de leur propre restaurant à menu gastronomique de haute volée. La forme la plus aboutie et la plus luxueuse de glamping.
Ce qui fait la différence ?
Dans ce sanctuaire, les clients peuvent faire l'expérience de la solitude, de l'intimité, de l'évasion et de l'aventure. La décision la plus difficile au réveil est de choisir la direction vers laquelle on veut aller, hormis la piscine et le spa. Il existe une encyclopédie d'activités, organisées sur mesure par l'équipe de conciergerie : promenade guidée chaque matin et soir sur les sentiers de randonnée, équitation sur le domaine au coucher du soleil, visite du parc national de Bryce Canyon… Pour une vue plongeante, direction une dizaine de via ferrata, sous la surveillance d'un grand-duc d'Amérique. On se souvient toute sa vie de la traversée des ponts de singe à plus de 100 m de hauteur. Plus haut encore ? Invoquez une montgolfière. On est au milieu des parcs nationaux de Bryce Canyon et de Zion, du lac Powell, à un saut en hélicoptère de Grand Canyon.
Bon à savoir ?
Amangiri a été construit et fonctionne selon des principes respectueux de l'environnement : programme de recyclage, interdiction du plastique, approche de la ferme à la table… Les systèmes de chauffage et de refroidissement sont géothermiques. Réduire son empreinte sur le paysage par tous les moyens.
Ce qu’il faut retenir ?
En plein désert, l’Amangiri est un des hôtels les plus exclusifs au monde qui se découvre par touche au fil des jours. De l’aridité et du désert, on perçoit ensuite les animaux, les lièvres de Californie, les écureuils terrestres, les coyotes, les chipmunks et les colibris. Notre guide nous montre ensuite que la croute noirâtre qui recouvre le sol est en réalité vivante et redevient vert tendre à chaque pluie. Que la terre résonne des traditions des peuples autochtones, des vibrations perçues par Ulrike Arnold dans ses œuvres. Des faisceaux de vie que l’Amangiri s’efforce de faire converger dans un décor exceptionnel.
Les 5 choses que l’on a aimées à l’Amangiri
- L'architecture en béton brut se fond sans effort dans les rochers, aussi bien que le paysage se mêle à chaque détail de l’hôtel.
- Le service toujours impeccable, minimaliste, anticipé,
- Tous les repas sont inclus et s’inspirent de la cuisine amérindienne et mexicaine. Les hôtes peuvent en profiter de manière égale à l’Amangiri ou au Camp Sarika. Le restaurant est décloisonné, la cuisine ouverte, les tables débordent sur une terrasse et la piscine.
- Le spa, une enclave de 2 300 m2 qui joue sur l’ombre et la lumière, où butinent des colibris. Pavillon d'eau, hammam, sauna, piscine, thérapies réparatrices ; pavillon de yoga au sommet d'une formation rocheuse. Les soins font appel aux éléments de la nature, à la terre, au vent, au feu, à l’eau, à la culture Navajo. On y passe une demi-journée ! Le Movement Journey, qui combine conscience du corps et de l'esprit, via ferrata, décors uniques et soins, dure un jour entier.
- La via ferrata guidée par Maya, ancien archéologue reconverti dans les sports d’aventure. De nouveaux parcours sont créés chaque année.
Comment s'y rendre ?
Vols réguliers de Phoenix à Page. Amangiri propose des transferts depuis l'aéroport de Page (25 minutes en voiture), et aussi depuis Pheonix et Las Vegas (entre 5 et 6 heures).
Amangiri
13 clés à partir de 2 900 € la nuit pour la Suite Mesa View ; 5 100 € pour la suite Amangiri.
Repas inclus, ainsi que certaines activités.
1 Kayenta Rd, Canyon Point, UT 84741, États-Unis