
Rencontre avec Louis Gachet, chef des restaurants du Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L'Occitane en Provence
Le Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L'Occitane en Provence est cet hôtel 5 étoiles du Luberon où l’on apprécie flâner de longues après-midi estivales. Complètement remis à neuf en 2023, cet ancien couvent datant de 1613 incarne un luxe élégant où se mêlent patrimoine et confort contemporain. Au détour des allées et chemins de croix en restanques, ce sont une chapelle, un clocher et un cloître qui témoignent de l’histoire du domaine.
49 chambres et suites y accueillent couples pour un week-end romantique et autres voyageurs pour un séjour bien-être. Le spa, signé L’Occitane en Provence, s’étend sur 2500m2 et comprend entre autres deux piscines, un hammam, deux saunas, et une cascade de glace avec vue sur les champs de lavande.
L’offre culinaire, composée de deux restaurants — un gastronomique et un bistrot — sont aux commandes de Louis Gachet, que nous avons rencontré le temps d’une interview et d’un dîner gastronomique mémorable.
Car la particularité du chef, outre le fait de proposer des associations singulières et une cuisine très personnelle, est de fournir un travail colossal dans l'assiette. 6, 8, parfois 10 préparations au sein d'un même plat, souvent extrêmement techniques, précises, bien dosées mais toujours au service de goûts accessibles. Le résultat donne vie à des créations à la fois complexes et régressives. Bref, on a passé un très grand moment à table, au point de lister le Feuillée de Louis Gachet parmi nos tables étoilées préférées de l'Hexagone. Mais maintenant, parole au chef !
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Le chef Louis Gachet au Couvent des Minimes
Yonder : Comment êtes-vous arrivé dans la restauration ?
Pour moi, la cuisine était une évidence. Je suis fils de restaurateurs bourguignons et c’est dès 6 ans que j’ai commencé mes premiers services, les week-ends, à La Marande, le restaurant de mes parents (aujourd’hui 1 étoile au Guide Michelin). On y servait les grands classiques de la cuisine bourguignonne en toute simplicité comme le poulet à la crème, les cuisses de grenouille en persillade ou la mousse de foie de volaille.
Où avez-vous ensuite fait vos armes ?
J’ai étudié à l’école hôtelière de Poligny dans le Jura, le temps d’un bac technologique en hôtellerie puis d’un BTS option arts de la table. C’est là que j’ai rencontré Pauline, mon épouse.
Le premier stage qui m’ait marqué a été à la Ferme du Chozal avec Cyril Suet, un chef locavore très avant-gardiste pour l’époque. J’ai ensuite été découvrir une plus grosse brigade à la Maison Troisgros, à Roanne en 2011. Ce sont la rigueur, couplée au travail en équipe, qui m’ont permis de me rendre compte que j’avais trouvé ma voie. Suite à cela, nous nous sommes installés 3 ans en Bourgogne à Saulieu avec Pauline, auprès de Bernard Loiseau et Patrick Bertron. On y travaillait une cuisine classique, avec des bases très formatrices et un management exceptionnel. Patrick Bertron était humain, proche de ses équipes ce qui contrastait beaucoup avec les mentalités en cuisine à l’époque.
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Dîner chez Louis Gachet © EL
La rencontre décisive de notre carrière a eu lieu en 2015 à l’Auberge du jeu de Paume de Chantilly : quand nous avons rencontré Arnaud Faye, alors tout juste auréolé de sa deuxième étoile Michelin. Nous sommes restés dans ses équipes pendant huit ans et demi. La transition a été particulièrement notable entre l’atmosphère très authentique de Saulieu et l’ambiance palace, ainsi que la cuisine très novatrice portée sur le végétal à Chantilly.
Et c’est depuis juin 2023 que nous sommes au Couvent des Minimes.
Que pouvez-vous nous dire sur votre relation avec le chef Arnaud Faye ?
Seulement 10 jours après notre arrivée à l’Auberge du jeu de Paume, le chef Arnaud Faye, le chef sommelier Anthony Hubault et le directeur du restaurant Mickael Magnier s’entraînaient tous les trois pour la finale du Meilleur Ouvrier de France. L’énergie que cette période nous a transmise était impressionnante et super motivante. On s’entendait très bien avec Arnaud et on l’a suivi au restaurant de La Chèvre d’Or (hôtel 5 étoiles sur la Côte d’Azur). Ça a été un tremplin. Pendant 7 ans, le rythme était très soutenu, et j’ai gravi les échelons dans son équipe jusqu’à l’accompagner concourir une dernière fois pour le titre du MOF, qu’il a obtenu. En 2023, ça a été mon tour de décrocher la récompense, et il m’a épaulé dans mon entraînement à Paris : une épreuve qui nous a encore rapprochés.
Pour l'anecdote, qui me semble explicative de ce à quoi notre relation peut ressembler : j'avais proposé à la Chèvre d’Or un plat assez classique : soupe de poisson, artichaut et anchois. Arnaud m’a suggéré de fumer les artichauts au barbecue, et ça a tellement amélioré le rendu que ça m’a vraiment montré l’importance de s’écouter en cuisine. C’est exactement ce qu’il se passe quand on travaille avec Arnaud Faye.
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Dîner au restaurant gastronomique du © Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L’Occitane en Provence
Diriez-vous que vous travaillez ainsi avec vos équipes aujourd’hui ?
À l’ouverture du restaurant au Couvent des Minimes, on est partis de rien. J’ai eu la chance d’être rejoint très rapidement par mes deux sous chefs de la Chèvre d’Or : Richard et Alexio. Forcément, l’équipe joue un rôle central dans la cuisine. Quand des jeunes sont motivés à nous rejoindre, on cherche à tout prix à les intégrer. Et on est très soudés : que ce soit pour le restaurant gastronomique ou le bistrot, tout le monde travaille en symbiose au quotidien.
Je mets d’ailleurs un point d’honneur à avoir les mêmes fournisseurs pour le gastronomique et le bistrot, cela évite d’imposer une frontière au sein de la même cuisine et c’est encourageant pour les équipes du bistrot.
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Le chef Louis Gachet en cuisine avec ses équipes © Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L’Occitane en Provence
À ce propos, est-ce important pour vous de vous fournir localement ?
À la Chèvre d’Or, on était très locavore. On l’est devenu complètement après un an d’ailleurs. En arrivant en Provence, dans une région maraîchère, je pensais que ce serait plus simple. Il s’est avéré que les maraîchers n’étaient pas aussi réceptifs à la rigueur que l’on demande sur les produits au niveau de la taille, du calibrage et du goût. On essaye de travailler le plus possible dans nos frontières mais je privilégie la qualité. Je suis prêt à payer cher pour d’excellents produits régionaux mais avec notre rythme de 150 à 200 couverts par jour, il est difficile de faire de l’ultra-local tout le temps. Nos poissons viennent principalement du Grau du Roi.
Comment définiriez-vous votre cuisine ?
En un mot ? Lisible. Il faut que les gens voient ce qu’ils mangent, ne jamais mettre trop d’ingrédients dans l’assiette. Chaque élément a son intérêt et on pousse les curseurs aromatiques aussi loin que l’on peut. On couple les saveurs de façon originale, de façon à ce qu’on ne les retrouve pas partout. On joue entre le réconfort qu’apportent certains plats et des associations plus osées pour surprendre. J’apprécie en particulier de travailler la moelle de bœuf, c’est mon arme secrète, je trouve que ça se marie très bien avec les produits de la mer.
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Le plat signature du chef Louis Gachet © Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L’Occitane en Provence
Notre plat emblématique est l’huître grillée au barbecue, avec une sauce gribiche très lisse, et palette de tête de veau croustillante. Pour l’anecdote, tous les lundis à Louhans, où nous allions avec mon père au marché de la volaille, les restaurants servent de la tête de veau, sauce gribiche, et je voulais faire honneur à ce souvenir. Ce plat, nous le servons avec une huile de 'nduja (un saucisson pimenté italien) et une quenelle de caviar. C’est très clivant, et mémorable ! Moi qui ne peux pas manger d’huîtres, j’ai quand même eu à cœur d’en proposer et il nous a fallu plus de 35 essais pour trouver la combinaison qui fait le succès de ce plat aujourd’hui.
Un dernier mot à nos lecteurs ?
N’ayez pas peur des intitulés du menu, prenez un peu de risques. On a des solutions de remplacement pour tout, et on veut montrer ce que l'on peut faire avec des produits que vous n’avez pas l'habitude de manger ou d’associer : du homard à la moelle, un rouget, foie gras et oursins, du riz de veau aux anchois… Tout est dosé, maîtrisé, ne vous refusez pas une expérience gastronomique sous prétexte que vous n’aimez pas certains des ingrédients.
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Le bistrot Pamparigouste © Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L’Occitane en Provence
Le Couvent des Minimes, un Hôtel & Spa L'Occitane en Provence
49 clés, à partir de 526 euros la nuit
Chemin des jeux de Maï, 04300 Mane