
Shuzo, enfin une fusion qui a tout bon
Un bistrot métissé
«Shuzo», contraction de shiso (plante aromatique japonaise) et chuzo (brochette typique de la street-food en Colombie), est un nom tout trouvé pour ce bistrot d'un genre inédit à Paris, puisqu'il mêle les ingrédients, les techniques et l'esprit des deux pays. Un restaurant à Paris qui s’est construit autour des forces complémentaires du duo qui en est à la tête : Andrès Ramirez et Gina Villacob, deux amis de longue date, qui ont décidé d'entreprendre ensemble pour créer ce lieu d'une grande originalité. Gina aux platines et à l’accueil, Andrés à la cuisine. Pensé comme un espace d’expression artistique et de partage, Shuzo est un hommage à la fête, à la curiosité et à la liberté d’inventer une nouvelle proposition culinaire.
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© Juan Arias
De fait, le choix de la rue Saint-Sébastien – bastion de la coolitude du 11ème arrondissement – est judicieux et le décor est des plus réussis. C’est le duo Smal Architectes, franco-colombiens installés à Blois, qui a donné corps à l’espace. On y trouve des étagères ouvertes, des noren (rideaux en tissu que l’on accroche traditionnellement à la porte d’entrée des restaurants au Japon) dessinés à la main ; et la vaisselle a été choisie avec soin pour accompagner les plats singuliers qui y sont proposés. Mais c'est la fresque murale, point de départ du projet architectural, qui attire d'emblée tous les regards. Réalisée par Soma Difusa, artiste colombienne de renom, elle met en lumière la complémentarité des gestes, des ingrédients et des ambiances qui font l'identité de chacun des deux pays. On s'amuse à en décrypter les totems et les petites scènes et cela met déjà dans l'ambiance pour le dîner
Une carte bien troussée
Avouons-le d'emblée, on a légèrement froncé les sourcils quand on nous a proposé d'aller découvrir un restaurant nippo-colombien en cette rentrée déjà bien chargée. Autant, la cuisine nikkei (nippo-péruvienne) fait déjà partie de notre répertoire culinaire, autant en l'espèce, on a cru à un coup marketing, voire au mariage de la carpe et du lapin... Heureusement, n'étant pas du genre à rester sur un a priori et la curiosité l'emportant, on est allés s'attabler chez Shuzo un vendredi soir. Salle pleine à craquer, beaucoup d'hispaniques dans la salle et un accueil des plus agréables. Aurait-on bien fait ?
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Tartare de pastèque © Juan Arias
La carte est à la fois surprenante et alléchante. Ne sachant pas trop que choisir, on se laisse guider par le chef, solaire et charmant. C'est lui, dont les racines sont à la fois colombiennes et japonaises, qui est le cœur vivant de Shuzo. Lui qui nous explique qu'il existe bel et bien une diaspora colombienne au Japon et lui encore qui nous décrypte la carte, les ingrédients typiques et les techniques culinaires qu'il a choisies. Lui enfin, qui nous montre avec fierté le beurre qu'il moule aux contours de son pays.
Le premier plat qu'il nous sert est tout simplement bluffant : un tartare de pastèque fumée avec mousseline de noix de cajou, huile verte et carantanta (huile de maïs). La pastèque est réellement traitée comme de la viande. On n'aime pas les ersatz, mais force est de constater que celui-là fait exception à la règle. Le pain de maïs est délicieux, mais en bon français, il nous en faudrait le double et qu'on nous laisse le beurre travaillé sur table (on ne se refait pas). La suite, si elle est plus classique, est également délicieuse. Des brochettes de poulet grillé au barbecue avec la fameuse sauce Shuzo. De mémoire, on n'a jamais mangé des brochettes de poulet qui conservent une aussi grande « jutosité ». Chapeau bas. Le plat de résistance : un tamal typique, mais revu à la sauce Andrès. Plaisant. Conclusion sur un dessert « Tamarillo et glace », soit une « tomate de arbol » confite qui n'est rien d'autre que de l'hibiscus au goût, une glace vanille et du sobacha pour le croquant. Charmant.
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Tamal © Juan Arias
Pour faire glisser le tout, une belle carte de vins nature, originaires d'Espagne pour la plupart, et des cocktails pour ceux qui voudraient continuer la soirée au son des platines de Gina.
Une bien jolie table, qui change assurément de tout ce que l'on connaît, sans bouger de Paris. Un peu plus de générosité, dans les portions comme dans le service en salle, et ce serait parfait !
Entrées 10-12€. Plats 13-17€. Desserts 9-12€. Cocktails 14€. Vins nature au verre 7-8€
Bouteilles 30-50€
Ce qu'il faut retenir ?
Une table originale, dans le bon sens du terme. Parfaite pour les papilles aventureuses et les amateurs de tapassiettes bien faites ; toujours à la recherche de sensations : culinaires, humaines et même musicales.
SHUZO
44 rue Saint Sébastien, 75011 Paris
Ouvert le soir du mercredi au vendredi, de midi à minuit le samedi et de 12h à 18h le dimanche. Se renseigner sur le site ou le compte Instagram pour la programmation musicale
shuzo.fr